L’origine du nom de Grümelscheid a toujours posé une énigme, et jusqu’à présent on ne lui a pas trouvé d’explication convaincante et documentée. Le toponyme « op der Grimmelbach » à Fennange reste lui aussi inexpliqué. Mais il est probable que le nom de Grümelscheid se base sur le nom propre de Grimold. Il se pourrait que ce Grimold ait eu des propriétés à Grümelscheid, car des documents de l’an 706 témoignant de donations à Echternach mentionnent déjà le nom de Grimonevilla. Ce nom se retrouve sous différentes formes au fil des siècles: Grymilscheid (1342), Grimelscheid (1364), Gromelscheit (1421), Grumesaux (1469), Grumelscheyt (1501), Grumelschet (1528), Grummelscheit (1623), jusqu’au Grümelscheid de nos jours (contrairement à l’Annuaire Officiel, la localité figure avec deux m dans l’annuaire téléphonique).

 

Les seigneurs de Grümelscheid, dont nous ignorons les origines exactes, ne faisaient pas partie de la haute noblesse, mais de la moyenne noblesse. Au 14e siècle, un certain Wiric d’Arsdorf est mort sans laisser d’enfants, et la famille de Grümelscheid recueillait cet héritage; elle possédait tous les droits de souveraineté et la haute justice, à l’exception du moulin qui était un fief des seigneurs de Kronenburg. Les Grümelscheid proposaient le curé et percevaient la dîme. Au 16e siècle, Johann de Saurfelt épousait la veuve d’un certain Gilles de Grümelscheid. Henri de Saurfelt, seigneur de Vance, introduisait le 23 janvier 1531 une déclaration de vassalité, d’après laquelle Charles V, comte de Luxembourg, lui concédait un quart de la seigneurie d’Arsdorf, ainsi que les seigneuries de Flaxweiler, Bilsdorf, Brattert, Grimelingen et Lamas comme fiefs. En 1575, un certain Nicolas de  Grümelscheid est mentionné comme collateur d’Arsdorf.

 

Mais en 1364 il y avait Jean de Grümelscheid, auquel le seigneur de Wiltz avait donné des terres à tenir en fief. Godefroi de Grümelscheid est cité comme témoin dans un document de Wiltz datant de 1378. Et en 1388, un Godard de Grümelscheid faisait partie du tribunal des nobles de Wiltz.

 

Certains détails concernant la famille ressortent d’un accord du 13 novembre 1414 entre  Gilles et Pierre de Grümelscheid et Jean de Messancy. Nous apprenons notamment que l’épouse de Godard de Grümelscheid (le ci-devant mentionné) s’appelait Marie et qu’elle avait épousé en secondes noces Jean de Messancy. Godard avait un fils prénommé Nicolas, qui épousait une certaine Catherine Reusin, et ce couple avait trois enfants : Frédéric, Charles et Elsa.

Grümelscheid Ortho
Grümelscheid vue
Grümelscheid église

Gilles de Grümelscheid, qui a conclu l’accord avec Jean de Messancy, est mentionné dans des actes de 1430 et 1449, sur lesquels il a apposé son sceau. Mais Godard de Grümelscheid avait un frère du nom de Jean, qui était l’un des 101 hommes gardiens du château de Wiltz. D’après le « Manbuch » de Wiltz, le fief qu’il tenait du châtelain comprenait une maison, un jardin, un champ et d’autres biens à Grümelscheid et à Breitscheit, et on l’estimait à 25 florins par an. Il avait également deux prévôtés en fief. En 1447, il est désigné dans un document comme gardien du château de Wiltz. Dans un document du 18 février 1464 il déclare tenir en fief du seigneur de Wiltz une ferme avec dépendances à Grümelscheid, des champs, des prés avec les tenures, le moulin à Breitscheit, la haute futaie de Grabach, une maison à Wiltz près du portail, un jardin, deux parts des biens à Breitscheit et la dîme de Breitscheit à Kaundorf.

Le relevé des foyers du prieuré de Bastogne de juillet 1469 dit : « En la ville de Grumesaux ait quatre maisons sur lesquels monseigneur At la haulteur, mais Jehan de Grumesaux est seigneur tresfoncier et des quatre y at une maison d’un gentilhomme. »

Jean avait quatre enfants: Pierre, Marguerite, Nicolas et Catherine. En 1486, Pierre est nommé « homme gardien » du château de Wiltz. Il était marié à Catherine de Lascheit et le couple avait sept enfants: Frédéric, Jean (curé à Oberwampach), Elisabeth, Catherine, Johannet, Marguerite et Marie. Pierre et Nicolas signaient le 20 mars 1498 comme témoins de l’acte de vente par lequel Jean de Weiler vendait la localité de Weiler au seigneur Gérard de Wiltz. Ils sont à nouveau cités comme témoins dans des documents de 1500 et 1501 : Nicolas (Clays) y est désigné comme « Mannriter » de Wiltz, Pierre comme vassal de la seigneurie de Wiltz. Pierre avait une maison et une ferme à Grümelscheid, ainsi que la maison à Wiltz, alors que Nicolas apparaît encore en 1522 comme juge des nobles.

En 1501, le relevé des foyers de Grümelscheid mentionne trois serfs et deux autres foyers, en 1525 et 1528 il est question de deux feux.

Jean, le fils de Frédéric, est né en 1500, et on parle de lui entre 1524 et 1567. Il épouse Marie von der Sardt dont il a quatre enfants: Nicolas, Dietrich, Anna, Marguerite. Nicolas se marie à Catherine von Hauss, et ce couple a dix à douze enfants, dont Charles, marié à Gertrud von Haussen, et Frédéric, désigné comme chevalier dans un document de 1553,  sont encore en vie en 1599. Ce Frédéric de Grümelscheid est également mentionné dans le coutumier d’Esch-sur-Sûre. La copie de ce coutumier porte la date du 14 mars 1201, mais à cette époque-là il n’existait encore aucun document en langue allemande, et les noms propres renvoient également à une date ultérieure, ce qui fait dire à Jules Vannérus que le document date de la période entre 1535 et 1550. Ce coutumier dit e.a.: „Brattarr hat V Feurstaidt, dieselben hoeren zu Friderichen von Gromelscheit und der zehndt in die kirch Ranschleidt. » Dans le relevé des foyers de 1537, Grümelscheid se retrouve avec trois foyers sous la Mairie de Doncourt (Doncols). L’existence d’une chapelle à Grümelscheid est prouvée dès 1558, car Jean de Wampach, curé à Oberwampach  (Bruder Hugos ) se disputait à cette époque avec les responsables de Grimmelscheid au sujet de la « facture de l’église ». Le litige se poursuivait pendant des années. En 1580, Frédéric de Grümelscheid vendait au seigneur de Wiltz la forêt de « Begerhart » qu’il avait héritée de sa tante Marie Schellart d’Enscherange.

Les corvées dues au seigneur de Grümelscheid en l’an 1533 nous sont aujourd’hui connues. Ses subalternes devaient effectuer des travaux de fauche et de séchage, battre le blé et rentrer les récoltes. Les hommes effectuant la fauche recevaient un quart de livre de lard, de la bouillie d’avoine, de la soupe grasse, du lait et deux œufs. Les autres  travailleurs devaient se contenter de soupe, de bouillie et de lait, et le soir de pain et de fromage.  L’an 1540 à Noël, l’annuaire des rentes de la seigneurie de Wiltz note un florin d’or et deux chapons comme redevance de la part du seigneur de Grümelscheid, et six chapons remis par Rinne Thies de Grümelscheid.

Marguerite, la fille de Jean, est mentionnée dans un acte du 28 mai 1567; elle était mariée à Georges Ramel de Steinbach. Les liens entre la famille de Steinbach et Grümelscheid subsisteront jusqu’au 18e siècle.

En 1599, le Conseil provincial a rendu un jugement sur la collation de la paroisse d’Arsdorf entre  Weyrich de Stein et Charles de Grümelscheid. Il ressort du jugement que ce Weyrich de Stein, qui avait encore des frères et soeurs, était le fils de Georges de Stein ou Steyn et de son épouse Marguerite de Wampach, et le petit-fils d’Elsa de Grümelscheid, elle-même descendante de Claus de Grümelscheid et mariée à Hans von Steyn, également connu comme Idel Hans en raison de son logement au « eydel hause » à Wiltz. Il était rappelé que Godard de Grümelscheid, conjointement avec Pierre de Grümelscheid, frère de Claus et oncle d’Elsa, avait déjà présenté Jean Prantz pour Arsdorf. Le droit de collation pour Arsdorf était accordé à Weyrich von Steyn, et Charles de Grümelscheid était condamné au paiement des frais de procédure.

Entre 1605 et 1635, c’est Jean Charles, l’époux de Gertrud von Haussen, qui est mentionné comme seigneur de Grümelscheid. Il est le constructeur de différentes parties du château, dont la cheminée était surmontée d’une pierre portant ses armoiries, une aigle noire sur fond doré (d’or à une aigle éployée de sable, armée, becquée et lampassée de gueules, disent les héraldistes), alors que les armories de son épouse présentaient trois faucilles bleues sur fond argenté. La pierre tombale de l’année 1635 a été préservée, elle se trouve dans l’actuelle chapelle. Voici ce qu’on dit sur Grümelscheid en 1623: « Au village de Grummelscheit sont sept maisons; l’une d’icelles est la maison Mons. Charles du dit Grummelscheit et seigneur très foncier du dit lieu. Sa Majesté y a la souveraineté et sont iceux de même obligés lorsque mort s’ensuit de quelque criminel comme les précents. » C’est-à-dire que le tribunal de Bastogne s’occupait de ces cas-là.

En 1626, Jean Charles de Grümelscheid se trouvait impliqué dans un autre litige, qui finissait devant le Conseil provincial: le 8 juillet, les gens de Wiltz tentaient, en recourant à la force, de l’empêcher à traverser  le pré banal sis sur le chemin vers Bastogne.  Quelques jours plus tard, le souverain du pays vendait au seigneur de Wiltz la haute et la moyenne justice de Grümelscheid, qui revenait jusqu’alors à Bastogne. Ce qui n’empêchait pas le prévôt de Bastogne d’exiger le 23 décembre 1628 le paiement d’une taxe de guerre de dix florins pour frais de passage de quelques soldats avec chariots à Bastogne de la part des habitants de Grümelscheid, qui comptait alors 2 1/2 foyers. Le baron Jean de Wiltz s’en plaignait auprès du Conseil provincial en déclarant « qu’à titre d’engagière il at acquis de Sa Ma(jes)te la haulte et moyenne justice avecque tous droits appartenans à icelle au village de Grümmelscheidt, mairie de Doncol, en ayant aussy déboursé le prix arresté », et que ni le prévôt de Bastogne ni le mayeur de Doncols ne pourraient donc y faire la loi.

En 1629, Jean Charles possédait le moulin à Enscherange, et suivant acte du Conseil provincial du 4 août de la même année, Louis Jean de Siebenaler était obligé d’y moudre. Un an plus tard, Frédéric de Grümelscheid, frère de Jean Charles, cédait la dîme correspondante au couvent de Hosingen, à condition de faire lire une grand-messe à Hosingen.

Suite à la guerre de Trente Ans et à la misère qui en résultait, le nombre des habitants de Grümelscheid, et par conséquent des redevables, se trouvait réduit à zéro. Plus tard nous y trouvons les dénommés Pierre Probst et Jean Keius. Probst disposait d’une tenure appartenant au seigneur qui rapportait trois chariots de foin,  qui s’étendait sur deux arpents de labours et   trois arpents de friches et qui incluait deux chevaux, quatre vaches et maintes dettes, dont 400 florins auprès de l’église de Grümelscheid, à laquelle il payait des intérêts. Il en était de même pour Jean Keius, qui récoltait quatre chariots de foin, disposait de 2,5 arpents de friches et de   trois arpents de labours, de trois chevaux, six bêtes à cornes et avait des dettes s’élevant à mille thaler, pour lesquels il payait des intérêts. A cette même époque, on trouvait à Grümelscheid encore trois autres tenures abandonnées appartenant au seigneur ainsi que la maison seigneuriale.

En 1659, on y comptait six ménages. Les paroissiens d’Oberwampach et de Grümelscheid se plaignaient en 1663 conjointement au sujet des habitants d’Allerborn qui refusaient de participer à certaines réparations de l’école. La misère était telle à Grümelscheid que la localité ne comptait plus que deux ménages en 1668, qui annonçaient à leur tour au Conseil provincial qu’ils seraient obligés de partir, écrasés par l’ampleur des obligations laissées par ceux qui avaient déjà quitté le village.

Grümelscheid n’était non seulement le lieu de résidence de la famille de Grümelscheid proprement dite, mais la famille de Steinbach y habitait également un certain temps. Les deux familles y résidaient conjointement pendant une période, ensuite la famille de Steinbach y habitait seule, car suite au mariage de Marguerite, la fille de Jean, avec Georges Ramel de Steinbach, cette dernière famille y avait également des droits. Dès 1578, leur fils Henri est désigné comme seigneur de Grümelscheid. En 1608 et 1623 il est question d’un certain Martin de Steinbach, époux de Catherine von der Heyden; en 1670 il réglait les plus vieilles factures annuelles du défunt responsable de la chapelle  « als Obermomper der Capelle Grümmelscheid », en présence du témoin Mathieu de Valensart, vicaire à Grümelscheid.

En 1681, Martin de Steinbach faisait une déclaration sur sa seigneurie. Grümelscheid a deux habitants, l’un « de servile condition », l’autre « de censive ». Ils doivent faucher, assurer les transports et le défrichage. Les Grümelscheid dépendent du comte de Wiltz. La seigneurie de Martin inclut une maison entourée d’un pré, un jardin destiné à la culture des légumes et du chanvre, huit prés qui rapportent environ vingt chariots de foin par an, un pré près du pont, un moulin banal pour les habitants, qui doivent en assurer l’entretien tout comme celui de la maison, le cours d’eau de la Wiltz du moulin jusqu’au pont – le moulin et la forêt « Broisbois » étant des fiefs princiers – six autres forêts, environ 50 arpents de labours, environ cent arpents de friches, le droit de chasse et de pêche sur les terres de Grümelscheid, la dîme de la paroisse d’Oberwampach, une maison au lieu-dit de Bouvey en tant que fief de l’infante Isabelle, en tant que fief également la seigneurie des villages de  Longbity et Onbonrey,  40 florins par an de la part du mayeur de Bouvey, où il peut également tenir un troupeau, aller à la pêche et à la chasse, en plus trois jardins à Bouvey, huit prés, deux tenures à Eschweiler, une part de la dîme à Kaundorf et un trentième de la dîme à Lascheid. Il est également collateur des paroisses d’Arsdorf et de Pintsch. Kins de Grümelscheid lui doit huit florins d’or pour son affranchissement, et si un enfant se marie à l’extérieur, le seigneur a droit à un « stier Wein ». En 1684, Martin de Steinbach et d’autres sieurs présentent Nicolas Streveler, âgé de 29 ans : il doit occuper le poste devenu vacant dans la paroisse de Pintsch, suite au décès de Cornelius Bintz.

Pierre-Bernard, le fils de Martin de Steinbach et de Catherine von der Heyden, avait épousé Ernestine de Girardin. Il est mort le 23 décembre 1750 à Grümelscheid, où il fut enterré dans la chapelle. Son épouse est décédée à Grümelscheid le 19 janvier 1742. De leur vivant (en 1704), une plainte était déposée par Oberwampach et Grümelscheid – dont l’école paroissiale est tellement vétuste « dass der Schulmeister nicht mehr darin wohnen kann » – contre la filiale d’Allerborn, qui n’avait ni enseignant ni école, mais qui ne voulait pas non plus participer à « der reparation oder erbauwung » de la maison à Oberwampach. La construction de la chapelle du château s’est faite au cours de la même période, car suite à une autorisation délivrée par le nonce de Cologne, le Conseil provincial accordait en 1712 la permission à Pierre-Bernard de Steinbach de construire une telle chapelle, à condition que les messes n’y soient dites que les dimanches et jours de fête, et que l’accès en soit limité à la famille seigneuriale et à leurs domestiques. Seuls les seigneurs de Grümelscheid et les de Cicignon d’Oberwampach avaient droit à des chaises spéciales près de l’autel de saint Lambert devant le chœur de l’église d’Oberwampach. Mais en 1719 la paroisse d’Oberwampach se vit néanmoins contrainte de reprocher leur refus de participer aux travaux de réparation du presbytère au sieur de Steinbach et à la veuve de Cicignon. Une convention était alors signée en 1723, d’après laquelle la veuve de Cicignon et Pierre-Bernard de Steinbach se libéraient pour toujours de toutes leurs obligations à l’égard de la paroisse, contre paiement des montants respectifs de 80 et 88 thaler. Quant à la paroisse d’Arsdorf, le seigneur de Grümelscheid y disposait (à tour de rôle) du droit de présentation, et Pierre-Bernard de Steinbach en profitait en 1725 en faveur de M. Binsfeld, qui succédait au défunt J. Spilman pour devenir curé d’Arsdorf. Il ressort d’une quittance de 1743 qu’il empruntait également de l’argent et des marchandises aux dames de Stein de  Schimpach. En 1748, il échangeait un  petit pré « dans la Zumpach » contre un labour au « Zeitert » appartenant au comte de Wiltz, auquel il payait en plus un montant de 45 thaler à titre de compensation.

Henri-François, le fils de Pierre-Bernard, épousait la vicomtesse Marie-Anne de Lardenois de Ville. Il est mort le 1er novembre 1767 et fut également inhumé dans la chapelle. Il donnait au château l’aspect que ce bâtiment avait jusqu’à sa démolition. Dans le relevé des foyers de  1759, il énumérait notamment l’ancien château de Breitscheit, sis près du moulin de Grümelscheid, qui était devenu une petite maison habitée par son chasseur, ainsi que le moulin banal de Grümelscheid, auquel sont liées quatre maisons à Grümelscheid – Kees, Probst, Marcus – ainsi qu’une autre, qui n’est pourtant point obligée de participer aux travaux de réparation du moulin.

Henri-François de Steinbach avait quatre enfants. L’aînée, Marie-Françoise, épousait le 10 août 1764 le baron Joseph-Ernest de Waha. Suite à l’acte de mariage, ce dernier devenait neuf jours plus tard seigneur de Grümelscheid, et il s’obligeait en même temps à payer 200 thaler aux deux soeurs de son épouse domiciliées à Grümelscheid, au cas où ces dernières partiraient. Jean-Baptiste de Waha, l’aîné des onze enfants du couple, a vu le jour le 23 août 1765. Il se retrouve au cœur d’une légende qui se raconte toujours dans la région, quoique sous des versions qui diffèrent légèrement.  

Dans le « Sagenschatz » de Nic. Gredt on lit sous le titre « Die verborgenen Schätze zu Grümelscheid »: « Der alte Herr von Grümelscheid vergrub sein Geld gegenüber seinem Schloss im Walde Grabich (auch Grabach genannt), weil er mit seinem ungeratenen Sohn in Zwietracht lebte. Als dieser ihm einst auf der Treppe begegnete, zog er rasch sein Schwert und durchbohrte den alten Vater. Im Sinken rief der tödlich Getroffene zum Fenster hinaus: ,Grabich, du bist reich und ich bin arm.’ (Nach einer anderen Mitteilung: ,Das Schloss zu Grümelscheid aber ist arm.’) Nach der Volksmeinung kann der Schatz auf Grabich gehoben werden, wenn man mit einem Spaten, worauf eine brennende und gesegnete Kerze steht, in den Wald geht. Mit dem Spaten zieht man dann einen Kreis, es erscheinen gespenstische Gestalten und erschrecken den Schatzgräber. Gerät dieser in Angst, dann ist der Schatz für ihn verloren. »

Il semble que  Henri-François de Steinbach ait été vraiment riche. Il est dit – mais point prouvé – qu’il aurait voulu racheter le château au comte de Wiltz. Ce dernier aurait été d’accord, si le sieur de Grümelscheid l’avait payé en pièces d’or alignées côte à côte entre les châteaux de Grümelscheid et de Wiltz. Le seigneur de Grümelscheid s’étant déclaré d’accord, le comte de Wiltz aurait exigé en plus un triple cercle de pièces d’or autour du château de Wiltz, et cette revendication fit échouer les négociations.

Quant à la légende concernant le trésor enterré à Grabich, il semble toutefois qu’il y ait –  comme c’est d’ailleurs le cas pour la plupart des légendes – quelque chose de vrai là-dedans.  Le forestier habitant en face du château avait une fille dont Jean-Baptiste (dit Fifi), le fils de Joseph-Ernest de Waha, était tombé amoureux. Le père s’opposait aux rencontres des deux. Le 15 avril 1785, le père vit le fils qui voulait se rendre auprès de sa belle et le rappelait à l’ordre. Jean-Baptiste retournait au château et courait à la rencontre de son père qui était en train de descendre l’escalier. Au cours de l’altercation qui s’ensuivait, le fils poignardait le père. Ce dernier tombait dans les bras de sa femme et de son avant-dernière fille en s’écriant : « Mon Fifi, qu’as-tu fait ? ». Quelques heures plus tard, il était mort. C’est ainsi que le Dr Neyen présente les faits, avant de raconter la suite des événements. La famille enlevait les traces de sang du défunt.  On s’accordait pour dire que le père voulait se rendre à Bruxelles via Bastogne, et qu’il était décédé inopinément en cours de route. Le cocher était mis dans la confidence et il sortait le mort de la maison pour le ramener  deux jours plus tard. La dépouille mortelle était enfin transportée à Oberwampach, où l’inhumation eut lieu le 17 avril à 9 heures. Le registre paroissial ne mentionne aucune cause de décès et ne dit pas non plus si les derniers sacrements ont été administrés au défunt. Le cocher ne rentrait que trois jours plus tard à Grümelscheid et déclarait partout qu’il avait bien conduit le sieur à Bastogne, d’où ce dernier devait poursuivre son voyage en direction de Bruxelles, mais qu’il était alors mort en cours de route.  L’inhumation dans l’une des cinq tombes des Grümelscheid à Oberwampach s’était déroulée dans la plus grande discrétion, mais néanmoins en présence du curé.

Jean-Baptiste de Waha traînassait longtemps dans la région. On se racontait bien des histoires, étant donné que sa disparition concordait avec le décès de son père. Mais étant d’origine noble, il ne pouvait être poursuivi en justice. Le 30 septembre 1794, il épousait Marguerite Lutgen de Noertrange (de 13 ans son aînée) dans l’église de Niederwiltz. Leur fils Henri a vu le jour le 15 septembre 1795, sa marraine était Marie-Françoise de Waha, la mère de Jean-Baptiste. Les époux eurent sept enfants, dont le dernier est né le 10 avril 1815.

Mais l’abolition de la féodalité dès 1794 avait également entraîné des changements de la situation juridique, et un noble tel Jean-Baptiste ne bénéficiait plus de l’immunité. Comme il y avait toujours des discussions sur son éventuelle implication dans l’étrange mort de son père, il finit par être emprisonné à Diekirch en 1806. Grâce à sa mère, qui tenait à sauver l’honneur familial, il était finalement déclaré malade mental, et deux ans plus tard il pouvait quitter la prison. Son épouse était chargée de veiller sur lui. On se racontait qu’à proximité de la cuisine du château il y avait une cachette, dans laquelle se trouvaient deux chaînes avec des carcans. Dès que des visiteurs se présentaient, Jean-Baptiste se serait retiré dans cette cachette et aurait fait cliqueter les chaînes pour qu’on continue de le croire fou. Il ne serait sorti que le soir, le visage masqué. Dans l’acte de naissance de l’un de ses enfants, il est désigné comme « journalier ». Il finissait par être emprisonné à nouveau, cette fois-ci à Liège, où il est mort, et à ce moment-là il semblait  effectivement souffrir de troubles mentaux. Il était déjà mort à la naissance de son dernier enfant.

En 1790, sa mère Marie-Françoise de Waha offrait la moitié de sa fortune à sa fille Marie-Gabrielle qui avait épousé Allard-Joseph de Heusch, et elle donnait l’autre moitié de sa propriété en bail à Jean Weyrich. Au fil du temps les relations familiales étaient mises à rude épreuve, car la châtelaine n’arrivait pas à accepter le fait que ses enfants épousent des roturiers voire des paysans, comme sa fille Marie-Ernestine, qui s’était mariée en 1791 au beau-frère de Jean-Baptiste, Nicolas Lutgen de Noertrange, que d’autres filles avaient des enfants illégitimes, que ses ressources financières baissaient d’une part suite à des indemnisations et partages, des procès et du prix à payer pour le silence de ceux qui avaient connaissance du meurtre, et d’autre part suite à l’abolition de la dîme et par conséquent des recettes manquantes. Après son décès en 1808, ses enfants se disputaient son héritage. On essayait d’exclure Jean-Baptiste complètement, et la donation à la dame de Heusch était également contestée, étant donné que Marie-Gabrielle, l’épouse d’Allard-Joseph de Heusch, avait été la deuxième enfant et que selon l’ancienne loi, seul le premier-né avait droit à l’héritage. On se disputait aussi le moulin de Breitscheid et les 107 hectares de terre qui y étaient rattachés, et ce procès a duré jusqu’en 1833. Les différents changements de régime y étaient également pour quelque chose, et les jugements rendus étaient souvent contradictoires. De sorte que la seigneurie de Grümelscheid était de plus en plus subdivisée, et le château avec ses dépendances comptait finalement quatre propriétaires. Des douaniers venaient s’y établir, et jusqu’à quatre familles y habitaient. La famille Mathieu de Wiltz, dont on raconte qu’elle est venue s’établir à Grümelscheid par peur du choléra, finissait par acquérir une partie du château après l’autre au fil des années, et elle a rénové le château au tournant du siècle. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, trois maisons et deux granges étaient complètement détruites, et toutes les autres maisons l’étaient partiellement. Le château de Grümelscheid était tellement endommagé qu’une reconstruction n’était pas envisageable. En novembre 1967, son propriétaire se déclarait d’accord avec une démolition par l’administration des travaux publics, suite à un incendie qui s’était déclaré quelques jours auparavant et qui avait  causé des dégâts supplémentaires.

Il ne reste donc plus rien de la richesse des anciens seigneurs de Grümelscheid. Mais il se pourrait néanmoins qu’une partie de leur fortune ait été enterrée au cours de la Révolution française. Car la rumeur qui courait pendant de longues années disait que le forestier avait aidé les seigneurs à enfouir de l’or, et qu’il l’aurait ensuite ressorti clandestinement pour construire quelques maisons à Doncols. Et on raconte aussi qu’une servante aurait vu un pot en pierre rempli d’or sous une dalle de la cuisine d’une maison. Et dans l’une des maisons bâties par le forestier, l’on aurait découvert une pompe en bois remplie d’or; ce trésor n’aurait été détecté que le jour où la pompe a été clivée en raison de son poids, afin de permettre son déplacement.  Et c’est ainsi qu’une vaste légende a fini par être tissée autour du trésor de Grabich.

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