Dans son ouvrage « Die Pfarrei Berlé und ihre Beziehungen zum Wiltzer Schloss » (La paroisse de Berlé et ses relations avec le château de Wiltz) paru en 1953 et consacré aux origines et à la date de création de la paroisse de Berlé, le père J. Thiel O.S.B. souligne que jusqu’en l’an 820, deux genres de subdivision de la dîme coexistaient : la coutume romaine et la coutume espagnole. La coutume romaine voulait que la dîme fût divisée en quatre parts, alors que la coutume espagnole – applicable en Espagne, en Gaule et au diocèse de Liège, dont Berlé faisait partie – n’en prévoyait que trois. En 821, les évêques décidaient que seul le modèle romain serait applicable en cas de création de nouvelles paroisses, mais que les paroisses existantes garderaient leur ancien modèle.

A Berlé, la dîme était divisée en quatre parts, dont deux revenaient au curé, et l’on peut en déduire que la paroisse de Berlé n’a donc été fondée qu’après 820. Mais il se pourrait également que la première église paroissiale de Berlé se trouvât hors du village, en un lieu désigné encore aujourd’hui comme « Al Kierch », et qu’après le déplacement de l’église dans le village même, l’évêché eût approuvé l’application du système de la dîme romaine au lieu du système espagnol éventuellement en vigueur jusqu’alors. Si tel était le cas, Berlé aurait pu être l’église-mère des paroisses voisines, car cette désignation est également appliquée à l’église paroissiale dans des documents datant de 1711 et de 1788, dont le premier se trouve aux archives du Conseil provincial, le deuxième aux archives à Bruxelles.

Le Père Thiel mentionne également une autre piste dont il ressort que Berlé est une très vieille paroisse: le premier patron de l’église était l’apôtre et évangéliste Jean, auquel étaient consacrées les églises du pays occupant la seconde position par rang d’âge, alors que Jean- Baptiste était le saint patron des plus vieilles églises.

Jadis Berlé faisait partie de la paroisse de Boulaide, dont les origines remontent encore plus loin dans le temps. Nicolas Majerus écrit dans son ouvrage « Die Luxemburger Gemeinden » qu’en 817 déjà, l’évêque Walcaudus de Liège confirmait l’église de Boulaide avec toutes ses dépendances à l’abbaye de Saint-Hubert. Mais nous ignorons en quelle année Berlé était détachée de Boulaide pour être érigée en paroisse autonome, avec Nothum comme filiale. N. Majerus pense que ce fut au Moyen Âge. En 1602, 1707 et 1775, le Seigneur de Wiltz est mentionné comme collateur.

C’est probablement en 1787 – l’année de la reconstruction de l’église – que saint Blaise en est devenu le saint patron. Une année auparavant, le 8 avril 1786, la paroisse avait adressé une requête au Conseil provincial, pour lui faire part de l’inquiétude des habitants qui craignaient un écroulement de l’église (« fürchtet, dass sie durch Einstürzung der Pfarrkirchen darin mögten begraben werden »), et elle demandait par conséquent aux décimateurs d’en construire une nouvelle et plus grande. Ces décimateurs étaient les soeurs franciscaines à Bastogne et Nicolas Metzler, le curé de Berlé, qui est mort en octobre 1787. Conformément au vœu des habitants, la restauration de l’église était précédée d’une inspection qui se déroulait le 7 août 1786 et au cours de laquelle il a été constaté – d’après un procès-verbal établi par le notaire Fr. Klein – que l’église était un vieil ouvrage délabré (« altes der gebrächlichkeit unterworfenen werck »). A l’époque Berlé comptait onze maisons, dont six dépendaient du comté de Wiltz et cinq du doyenné de Bastogne. La haute justice de Wiltz et la basse justice de Kaundorf étaient compétentes pour l’ensemble du village. Ce dernier comptait 103 habitants. Le 12 octobre 1787, le curé Nicolas Metzler dictait un testament au notaire Bernard, et cet écrit était ouvert le 23 octobre. Le 9 juin 1788, ses héritiers soulignaient que les travaux de restauration, qui étaient donc terminés à ce moment-là, avaient coûté 557 écus; la fabrique d’église ayant apporté une contribution de 271 écus, il restait 268 écus à charge des soeurs franciscaines de Bastogne, qui n’avaient payé qu’un acompte de 100 écus. Pour assurer le financement, la fabrique d’église avait donné en gage – pour 80 écus et 12 patards – un pré d’un demi-arpent et 19 perches au lieu-dit « Sollersteg », et un deuxième pré appelé « Piufferwies » au « Krütboewen » entre Loutsch et Agnessen, d’une longueur de 8,5 perches et d’une largeur de 7 perches, pour 25 « Kaubkronen » et 7 patards.

Le successeur de Nicolas Metzler était Frédéric Dernoeden de Weidingen, qui reçut son approbation le 25 avril 1789. Son investiture eut lieu le 12 mai de la même année, car il avait été dispensé du concours pastoral le 18 octobre 1788, étant donné que le prince-évêque de Liège, en sa qualité d’évêque diocésain de Berlé, n’avait pas encore imposé ce concours. Jusqu’à son investiture, Dernoeden avait été l’administrateur de la paroisse. Dans un rapport envoyé à Bruxelles, il décrivait l’état de l’église et mentionnait le coût des travaux qui s’imposaient: « Die pfarrkirch ist zwar neu erbaut, aber nur schlechterdings gedeckt, der gestalt, dass sie noch nicht inwendig geweist noch pavirt ist. Sie hat keinen Altar, eine glock zerrissen, die kirchhofsmauern dem boden gleich; welches all mus, und doch nicht kan unter 500 gulden ausgemacht werden. »

Saint Blaise était vénéré à Berlé bien avant qu’il ne devienne le patron de l’église. L’existence d’un tel culte est prouvée pour l’année 1737. Mais il est probable qu’il n’existait pas encore avant la guerre de Trente Ans (1618 – 1648), car c’est l’évangéliste Jean qui est mentionné en 1602, et pas encore saint Blaise.

Jusqu’en 1794, la propriété paroissiale ou « Widdem » englobait quatre jardins d’une superficie totale d’un arpent. Deux jardins se trouvaient respectivement devant et derrière la maison paroissiale, un troisième au « Bourenloch » entre Loutsche et Agnessen, le quatrième au « Bourenloch » près du « Pfarrwiddem ». S’y ajoutaient trois prés au « Bourenloch » d’une superficie totale de trois arpents, et trois terrains essartés au « Boewenerbusch », le long de la route à Pommerloch et au « Bourenloch » (environ 40 arpents au total), cinq terrains à haies situés « in Tickert », au « Bourenloch », au « Wetterschock » et à Pommerloch, (25 arpents au total), ainsi qu’un champ d’un arpent et demi « in Dasbich ». La superficie totale de la propriété paroissiale était d’environ 72 arpents. Le revenu annuel du curé s’élevait à 207 florins, 17 patards et 3 liards. La propriété de la fabrique d’église englobait quatre prés : les deux mis en gage en vue de la construction de l’église paroissiale, un pré « auf der Alleren » et un autre « bei Gerenshausen » (Pesch).

Les religieuses de Bastogne touchaient une partie de la dîme, qui s’élevait à 15 maldres de céréales, moitié seigle, moitié avoine. En 1788, les recettes générées par les biens paroissiaux étaient de 121 florins et 8 liards, les dépenses se chiffraient à 81 florins 18 patards, dont 40 florins 11 patards pour le curé, qui célébrait en contrepartie les messes fondées et assurait la comptabilité de la fabrique d’église, et 8 florins 3 patards pour le vicaire, qui devait dire trois messes, chanter les messes fondées en assumant le rôle de sacristain et fournir les hosties.

Deux propositions concernant Berlé étaient présentées dans le cadre de la restructuration paroissiale en 1803. D’après la première, Berlé, Nothum et Boevange, qui comptaient 74 maisons au total, devaient former une annexe de la paroisse de Kaundorf. La deuxième proposition, soutenue par le maire Tock de Mecher, consistait à intégrer Berlé, Doncols, le moulin Hutton et La Bohaye à la paroisse de Sonlez. Le maire Tock admettait qu’on s’exprimait et enseignait effectivement « en français » (wallon) à Doncols et à Sonlez, mais que ce serait une bonne occasion pour les habitants de Berlé d’apprendre cette langue. A l’époque, Berlé comptait 17 maisons, Boevange 13, Doncols 40, Kaundorf 37, Nothum 14, Sonlez 8. Suite aux nombreuses protestations, l’idée de la réorganisation paroissiale a été abandonnée, et la paroisse de Berlé a survécu jusqu’à nos jours.

Il semble que la bonne entente entre les paroisses de Berlé et de Sonlez ait des fois laissé à désirer, car il ressort d’un document du Conseil provincial datant de 1510 qu’un certain Thil Goudeler de Berlé avait été excommunié pour avoir frappé le curé Glais de « sonle oder Donkolz ». Goudeler répliquait qu’il avait été excommunié à tort, car il n’aurait pas frappé le curé. Mais il y avait également des querelles avec des curés d’autres paroisses. Ce fut notamment le cas en 1623, lorsque Caspar Derenbach, curé à Oberwampach et âgé de 80 ans, se plaignait auprès du Conseil provincial au sujet des violations de domicile permanentes commises par un habitant de Berlé : ce dernier se présenterait en compagnie d’un soldat, menacerait les habitants et commettrait des actes de violence sur les domestiques. Nicolas de Longvilly, curé de Berlé, portait plainte en 1640 parce qu’un particulier s’était approprié la dîme du village. En 1656, le curé Nicolaus Linxweiler achetait un cheval à un soldat de la compagnie de Housse, et le notaire en dressait le protocole.
La première désignation de Berlé comme église-mère remonte probablement à 1711, lorsque le curé du village et les responsables locaux attiraient l’attention du Conseil provincial sur le fait que « leur paroisse étant mère-église », elle était en droit « de tirer un demi-bichet de chaque maldre de la grosse dîme perçue par les Religieuses de Bethléem à Bastogn », mais qu’on les ‘oubliait’ depuis plusieurs années lors de la perception de la dîme et qu’ils ne pouvaient pas contrôler ce qui leur revenait de droit.

En 1731, une nouvelle maison devait être mise à disposition du curé Friedrich Wiesennach, mais au mois de juin la paroisse lui demandait de patienter jusqu’à la Saint-Michel. Elle lui construirait alors également un nouveau four. En contrepartie, le curé s’oblige : « lebenslänglich jedes Jahr den dienst uff den hagelfeyertag, so jahrs den vierten Brachmonath gehalten werden soll, ohne fernere Besoldung zu thun, mitsamt der gewohnliger processionen».

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